Traumatismes crânio-cérébraux légers
La sortie, mercredi 9 mars 2016 en France, du film « Concussion » (titre original)- « Seul contre tous » en français – avec l’acteur Will Smith – est l’occasion d’informer le grand public sur l’encéphalopathie traumatique chronique.
Ce film est inspiré d’une histoire vraie : le Dr Bennet Omalu, neuropathologiste de médecine légale d’origine nigérienne, est le premier à avoir identifié l’encéphalopathie traumatique chronique en pratiquant en 2002, à Pittsburg (Etats-Unis), l’autopsie de Mike Webster (joueur de Football américain vedette).Il fût également le 1er à dénoncer la responsabilité de la ligue américaine de football (NFL), se heurtant à un important lobbying.
Commotions cérébrales à répétition
L’encéphalopathie traumatique chronique est une maladie neurodégénérative causée par la répétition de chocs, même légers, à la tête (traumatismes crâniens dits légers), au visage ou à la colonne cervicale. Pour désigner les dommages cérébraux causés par ces chocs, les anglo-saxons utilisent le terme de « Concussion », en français « Commotion cérébrale ».
Les symptômes sont divers : perte de conscience ou non, vertiges, nausées, vomissements, maux de tête, troubles de la mémoire, troubles comportementaux (agressivité, instabilité émotionnelle), démence, troubles du sommeil, dépression, tremblements, problèmes de coordination des membres, problèmes de langage…
Des chercheurs ont expliqué dans le Journal of Athletic Training, qu’au niveau du cerveau, le choc provoque une libération de neurotransmetteurs (composé chimique qui assure la communication des neurones entre eux au niveau des synapses) et d’ions sodium, potassium et calcium. Pour contrôler cette effervescence chimique et la ramener à des taux normaux, le cerveau va métaboliser de plus en plus de glucose alors que la circulation sanguine du cerveau est lourdement diminuée. Ainsi, un 2nd choc sur le cerveau en perte énergétique, peut entraîner des séquelles qui vont perdurer.
Diagnostic
Le diagnostic n’est pas toujours évident en l’absence d’imagerie médicale probante. De plus, les symptômes sont très variés et ne sont pas toujours immédiatement visibles : ils apparaissent souvent lorsque le sportif arrête sa carrière. Seule l’autopsie post-mortem a permis aux chercheurs de mettre en évidence la présence de la protéine tau dans les neurones de sportifs, qui est responsable de l’atrophie de l’hippocampe (structure du cerveau déterminante dans la mémoire et l’orientation spatiale) qui est caractéristique de la maladie (comme pour la maladie d’Alzheimer).
En 1928, les chercheurs ont qualifié « punch drunk » les commotions cérébrales des boxeurs puis utilisé le terme de démence pugilistique en 1937, cette dernière se traduisant par des tremblements (semblables à la maladie de Parkinson), une hypophonie (fait de parler très bas). Aujourd’hui on sait que cette maladie concerne de nombreux sports : football américain, hockey, rugby (les chocs indirects comme les plaquages peuvent générer un mouvement du cerveau contre la boîte crânienne).
Evolution de la maladie
La maladie est évolutive. Seul un traitement symptomatique permet d’en atténuer les conséquences. Pour les spécialistes, la prévention pourrait être efficace: s’équiper de protections physiques (comme un casque) ou retarder le retour sur le terrain. Selon le Dr Tator, neurochirurgien expert du traumatisme crânien et des commotions cérébrales : «Nous croyons que le fait de n’autoriser le retour au jeu qu’à partir du moment où les symptômes ne réapparaissent pas en situation de pratique réduit l’incidence de complications durables. Mais encore là, ce n’est pas prouvé».
Par ailleurs, tous les athlètes ayant subi des commotions cérébrales répétées ne vont pas développer une encéphalopathie traumatique chronique. Le Docteur Tator, avec son équipe au Krembil Neuroscience Center (Toronto) cherche à savoir pourquoi certains joueurs de football ou de hockey ne développent pas la maladie alors qu’ils ont souffert de chocs répétés. Il déclare «Je crois que l’individu doit présenter une certaine vulnérabilité. Celle-ci dépend peut-être de l’âge auquel la personne subit sa première commotion cérébrale. Nous n’en savons rien. On soupçonne aussi l’existence d’un facteur génétique, car les membres de certaines familles sont plus susceptibles de souffrir d’une commotion cérébrale à la suite d’un traumatisme que d’autres. Et certains individus seraient plus à risque d’en garder des séquelles à long terme que d’autres ».
Toujours est-il que les actions préventives se multiplient en France et outre Atlantique, dans le domaine du rugby notamment avec l’élaboration de protocoles pour espacer la reprise d’activité lorsqu’il y a un choc (Fédération française de rugby, Ligue de Rugby, Loi Rowan…)
Aux USA, la ligue nationale de football américain a été attaquée par plus de 4000 anciens joueurs atteints de pathologies graves (maladie d’Alzheimer, maladie de Charcot…) ainsi que par leurs familles. Elle a accepté, en 2014, de les indemniser à hauteur de 675 millions de dollars.
Malheureusement, les chercheurs ont constaté qu’il n’y a pas que les sportifs qui sont concernés par cette maladie : certains soldats, sous les chocs d’explosions qui provoquent des mouvements violents de la tête, développent également l’encéphalopathie traumatique chronique.
Sources : http://www.psychostrategy.net
Image : Wikipedia – Zwarck – CC-BY-SA-2.5.
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