Les chercheurs de l’INSERM et de l’hôpital pédiatrique Robert-Debré (AP-HP) ont réalisé une avancée dans l’imagerie médicale. Ils ont réussi, par une technique non invasive à imager le cerveau des nouveaux-nés de manière très précise : c’est ce que révèle une étude publiée dans la revue Science Translationnal Medicine le 11 octobre 2017.
Neuroimagerie fonctionnelle par ultrasons
Jusqu’à présent, les moyens d’observation du cerveau des bébés étaient limités lorsque les médecins soupçonnaient l’existence d’une lésion cérébrale ou un mauvais fonctionnement : soit ils utilisaient l’échographie ou l’électroencépalographie(EEG), techniques non invasives mais peu précises, soit l’ IRM (imagerie par résonance magnétique) ou la TEP (tomographie par émission de positons) qui impliquaient d’immobiliser le bébé et de procéder à une injection. Ces méthodes étaient lourdes et coûteuses.
Le nouveau dispositif est portable et placé au chevet du patient : la sonde ultrasonore est clipsée sur un portoir posé juste en-dessus de la fontanelle du bébé, ainsi, ce dernier peut bouger sans être gêné.
Les chercheurs se sont basés sur une technique d’imagerie neuro-fonctionnelle par ultrasons initiée au début des années 2000 et améliorée en 2008 avec le développement de l’informatique: » l’échographie à effet Doppler ultra rapide », qui permet d’obtenir 10 000 images à la seconde.
Elle permet d’observer le flux sanguin dans de tout petits vaisseaux et donc de visualiser précisément la localisation du dysfonctionnement de l’activité cérébrale.
L’équipe de Mickaël Tanter, directeur de recherche à l’INSERM, a étudié 2 groupes de nouveaux nés : l’un présentant des troubles épileptiques observé pendant et en dehors des crises et l’autre, en bonne santé, observé pendant 2 phases de sommeil distinctes.
Les résultats ont été similaires que ceux observés par EEG pour le sommeil et par IRM pour l’épilepsie.
Dans le cas des bébés épileptiques, la technique a même permis d’aller plus loin, permettant de visualiser la propagation des flux sanguins entre et pendant les crises d’épilepsie : les foyers de crise ont pu être localisés avec précision.
Selon Olivier Baud, coauteur l’étude : «Avec l’échographie fonctionnelle, nous pourrons aussi surveiller en temps réel le fonctionnement du cerveau du nouveau-né en cas d’une chute de tension ou d’une infection afin de savoir s’il faut ou non le traiter. Alors qu’aujourd’hui on le soigne souvent en aveugle par précaution.»
De plus, la technique mesure des paramètres nouveaux :
« Grâce à cette imagerie ultrarapide, nous avons pu observer les vibrations mécaniques du corps, comme celles produites par le rythme cardiaque et la respiration. En focalisant le faisceau ultrasonore rapide sur un organe spécifique, nous sommes en mesure de créer une vibration et « palper », de manière non invasive, une partie spécifique du corps, comme un médecin le ferait de ses mains s’il pouvait atteindre les organes internes. Cette « sismologie » du corps humain est essentielle dans la pose du diagnostic. Nous pouvons désormais mesurer la raideur d’une lésion, identifier sa nature bénigne ou maligne et repérer les tissus cancéreux », dixit Mickael Tanter.
Aussi, ce type d’imagerie sera prochainement utilisée pour détecter plus précocement les troubles autistiques.
Seul bémol, les ultrasons ne peuvent pas pénétrer la boîte crânienne, cette technique ne peut être utilisée que sur des bébés qui n’ont pas la fontanelle encore fermée mais des tests sont envisagés sur les adultes pour faire passer les ultrasons par la tempe où l’os est plus fin ou par le trou occipital.
Le projet a été financé par le Commission européenne à hauteur de 2,5 millions d’euros via le Conseil européen de la recherche.
Dorénavant, les chercheurs travaillent à l’amélioration du concept pour développer une technique d’échographie « super-résolution » qui permettrait d’imager l’activité cérébrale fonctionnelle du cerveau à l’échelle microscopique.
Source : http://stm.sciencemag.org/content/9/411/eaah6756
Image:© Pixabay